Déclaration de consensus D-A-CH sur la EM/SFC

Déclaration de consensus D-A-CH sur la EM/SFC

Un groupe d'experts interdisciplinaire de la région D-A-CH a élaboré une déclaration de consensus sur le diagnostic et le traitement de l'EM/SFC, qui a été publiée en mai 2024.

33 experts en encéphalomyélite myalgique/syndrome de fatigue chronique (EM/SFC) d'Allemagne, d'Autriche et de Suisse ont participé à son élaboration. En Suisse, les experts en ME/CFS Gregory Fretz, Jürg Hamacher, Martina King, Jonas Sagelsdorff et Maja Strasser ont été impliqués.

La déclaration de consensus donne un aperçu complet de l'état actuel des connaissances sur l'EM/SFC, met en évidence les critères cliniques des critères de consensus canadiens (CCC) en se concentrant sur le symptôme principal du malaise post-exercice (PEM) comme base pour le diagnostic et présente les options thérapeutiques disponibles et les développements futurs.

 

Qu'est-ce que l'EM/SFC ?

L'EM/SFC, une maladie chronique multisystémique, peut entraîner des handicaps physiques et cognitifs importants qui, dans les cas graves, conduisent à une dépendance totale. L'EM/SFC affecte le système nerveux central et autonome, le système immunitaire, le système cardiovasculaire, la production d'énergie dans les mitochondries, le microbiome intestinal et la perfusion des muscles, du cerveau et d'autres organes.

Il est souligné qu'il s'agit d'une maladie somatique (physique). L'une des principales causes est la réaction excessive à un virus, comme on peut l'observer après des infections de COVID-19. En outre, la maladie peut provoquer une réactivation des virus présents dans l'organisme et causer ainsi d'autres dommages.

 

Critères et défis diagnostiques

Des études internationales estiment que 84 à 90% des personnes atteintes d'EM/SFC ne sont pas ou mal diagnostiquées. La prise en charge en Suisse, en Autriche et en Allemagne présente de grandes lacunes. En moyenne, il s'écoule environ 7 ans avant que le diagnostic ne soit posé.

Avant d'obtenir un diagnostic correct, les personnes atteintes doivent consulter en moyenne 11 médecins différents et subir 2,6 erreurs de diagnostic - certaines de ces erreurs de diagnostic peuvent conduire à des traitements qui aggravent encore les symptômes de l'EM/SFC.

La déclaration de consensus recommande les critères de consensus canadiens (CCC) comme étalon-or pour le diagnostic. Le symptôme principal est le malaise post-exercice (PEM), qui est essentiel pour une délimitation précise. Le PEM décrit une détérioration de l'état de santé après un faible effort, qui peut durer des jours ou des semaines.

L'établissement du diagnostic nécessite une anamnèse différenciée et l'exclusion d'autres maladies. La distinction avec les maladies psychiques, par exemple la dépression ou le burnout, est essentielle pour éviter les erreurs de traitement. Les patients atteints de dépression ou de burnout souffrent d'un manque de motivation qui peut être traité par des mesures d'activation.

Chez les personnes atteintes d'EM/SFC, il n'y a pas de trouble de la motivation ; pour les personnes affecté du PEM, un traitement activant entraîne une détérioration.

Pour qu'il y ait un diagnostic de l`EM/SFC selon les critères CCC, les cinq critères principaux doivent être remplis :

  • Malaise post-exercice
  • Fatigue pathologique avec restrictions dans la vie quotidienne
  • Troubles du sommeil
  • Douleurs
  • Manifestations neurologiques/cognitives

 

ainsi qu'au moins deux critères secondaires :

  • Manifestations du système nerveux autonome
  • Manifestations neuroendocrines
  • Manifestations immunologiques

 

L'échelle de Bell (0-100) est le meilleur moyen de déterminer le degré de gravité d'une maladie EM/SFC. Une valeur de 100 points correspond à un état sain et 0 point à l'état d'une personne très gravement atteinte (grabataire, nécessitant des soins a tout heures, très sensible aux irritations). Comme l'évolution de la maladie peut montrer de fortes variations, il est recommandé de demander, en plus de la valeur actuelle de Bell, la meilleure et la pire valeur au cours de la maladie.

À l'avenir, le questionnaire FUNCAP55 pourrait être utile pour évaluer la capacité fonctionnelle dans l'EM/SFC.

 

Concepts thérapeutiques actuels et futurs

La déclaration de consensus met l'accent sur deux piliers principaux de la thérapie : le pacing pour éviter les PEM et les mesures de soulagement des symptômes. Le pacing aide les personnes concernées à répartir leur énergie de manière ciblée et à éviter les surcharges.

Le pacing est l'élément de base le plus important du traitement de l'EM/SFC et a toujours la priorité sur les autres mesures.

La thérapie comprend un soutien physiothérapeutique et psychologique personnalisé afin d'éviter une aggravation. Le traitement des comorbidités et une médication adaptée sont également essentiels.

Pour les patients les plus gravement atteints, des soins intensifs à domicile et des thérapies spécialisées sont nécessaires. La prévention et l'éducation, notamment en ce qui concerne Long COVID, jouent un rôle clé dans les soins à long terme.

 

Le tableau suivant résume les recommandations des options thérapeutiques actuelles. Ces options thérapeutiques ne doivent être envisagées qu'en l'absence de contre-indication.

 

Pacing en premier lieu : Traitement adéquat de tous les symptômes et des comorbidités en tenant compte de la PEM

PEM

Pacing, wearables, journaux d'activité/de symptômes.

Sommeil/détente

 

Techniques de relaxation, mélatonine à effet retard, antihistaminiques H1 de première génération, par exemple diphénhydramine, antidépresseurs à faible dose (un dixième à un quart de la dose normale : par exemple mirtazapine, trimipramine, doxépine ; pas d'amitriptyline en cas de tachycardie/POTS).

Intolérance orthostatique (IO) (POTS et OH)

 

Boire au moins 3 l de liquide/jour, surtout aussi des jus électrolytiques, augmentation de l'apport en sel, collants de soutien/bandelettes abdominales, médication : par ex. ivabradine/nébivolol [164], Mestinon, fludrocortisone, midodrine selon le complexe de symptômes. Éventuellement, substitution volumétrique par une solution saline physiologique.

Douleurs

 

Thérapie manuelle prudente ou physiothérapie, stimulation nerveuse/vagale transcutanée, médication : par ex. paracétamol/ibuprofène/métamizole, gabapentine/prégabaline, LDN selon la symptomatologie de la douleur, implication de la médecine de la douleur.

Symptômes du syndrome des jambes sans repos

Essai avec l'agoniste dopaminergique Rotigotion sous forme de patch (1-3 mg/24 h).

Hyperactivité des mastocytes/ MCAS

Bloqueurs H1 et H2, éventuellement soutenus par des stabilisateurs de mastocytes tels que le kétotifène et l'acide cromoglicique.

Dysfonctionnements cognitifs

Selon les résultats, traitement indirect du dysfonctionnement cognitif via l'atténuation des symptômes de la suractivité des mastocytes/MCAS et/ou de l'IO ainsi que du pacing. LDN, LDA.

Compléments alimentaires

 

Pour soutenir le métabolisme mitochondrial et/ou pour compenser les déficits. Compensation hormonale neuroendocrinienne en cas de déficits.

Médicaments "off-label" pour des complexes de symptômes

 

Mestinon (POTS, fatigue, PEM), [162] LDN (fatigue, dysfonctionnement cognitif, PEM, douleurs), [165, 166] LDA (fatigue, dysfonctionnement cognitif, PEM, hypersensibilité aux stimuli), [167] ‑NAcétylcystéine (NAC) et éventuellement guanfacine (fatigue, dysfonctionnement cognitif, PEM), [168] médicaments neuromodulateurs, médicaments pour troubles circulatoires.

Si nécessaire, soutien par des diététiciens, des ergothérapeutes, des psychologues cliniciens, des psychothérapeutes, des physiothérapeutes et des infirmiers diplômés ayant reçu une formation spécifique. Soutien psychologique.

Dans ce cas, il est important de mettre à la disposition des patients et de leurs proches des professionnels de la santé formés en conséquence (par ex. pour les soins par sonde jéjunale et l'alimentation) et des moyens auxiliaires (des matelas anti-escarres aux fauteuils roulants électriques avec fonction de couchage, en passant par les futures possibilités de télésurveillance).

Adapté et traduit d'Infoblox 1 de la déclaration de consensus.

 

Implications sociales et médicales

L'accès à des soins médicaux et à un soutien social adéquats reste un défi. Le fait que de nombreuses patientes ne reçoivent le bon diagnostic qu'après des années peut aggraver leur situation. L'une des principales revendications de la déclaration est d'améliorer la reconnaissance (y compris par les experts, l'AI et les caisses d'assurance maladie) de l'EM/SFC et de mettre en place des établissements spécialisés ainsi que des programmes de formation pour le personnel médical.